mardi 24 octobre 2017

La Revanche d'une blonde (Robert Luketic, 2001)

Inutile de chipoter, La Revanche d'une blonde est le meilleur film de Reese Witherspoon. On pourra toujours prétendre qu’elle a amplement mérité son Oscar pour Walk the line, vous savez ce biopic si gentil sur Johnny Cash (mieux vaut voir Walk hard the Dewey Cox Story), mais son vrai rôle génial est celui de Elle Woods. Elle, un prénom donné tel quel, pas le diminutif de Elizabeth ou Elaine, juste Elle : la Femme, Elle : la blonde de cinéma. Son nom complet sonne Hollywood, il n'en faut pas plus pour faire du film une fable sur la place des actrices blondes.

« J'ai conseillé Cameron Diaz de ne pas acheter un pull angora », voilà l'argument massue que Elle donne dans sa vidéo de candidature pour entrer à Harvard. Jusqu'à présent, Elle Woods était la présidente de la sororité Delta Nu sur un campus californien, un campus comme les films de campus en montrent régulièrement avec ses corps similaires, les étudiants mâles sont des sportifs beefcake en short arborant leur pectoraux en public et les femelles sont des bimbos blondes toutes minces qui se promènent en petite tenue dans la demeure Delta Nu.

L'horizon de ces demoiselles est tout tracé et celui de Elle plus encore. Son objectif : épouser Warren (Mathew Davis) son petit ami, jeune, beau et riche. Toutes les « sœurs » de Elle attendent ce soir où Warren va la demander en mariage. Ce soir-là arrive enfin, ils sont au restaurant tous les deux mais là, Warren rompt avec elle « si je veux devenir sénateur à 30 ans, j'ai besoin d'une Jackie, pas d'une Marilyn ». Le père de Elle, verre de Martini à la main, ton d'oisif, au bord de la piscine, ne lui dit d'ailleurs pas autre chose. La blonde californienne est superficielle et destinée au mariage.

Aujourd'hui, pour faire un film sur le sexisme, sur la discrimination à l'embauche, sur les clichés sur les blondes, Hollywood ferait sans doute un film social de 2h20 extrêmement édifiant, en 2001, il faisait des comédies et La Revanche d'une blonde n'est pas sans rappeler American girls où Kirsten Dunst devenait chef des pom-pom girls. Pour Elle Woods, le passage du soleil californien à Harvard et ses murs de lierre. Son arrivée dans l'université de l'ivy league ne passe pas inaperçue, elle n'a pas encore troqué ses robes roses courtes pour les tailleurs noirs.

Warren est désormais fiancé à Vivian (Selma Blair) la « Jackie » qu'il s'est trouvée à Harvard, amatrice de tailleurs gris ou noirs, brune à la franche sinistre et adversaire de Elle. La transition entre la couleur et le noir passe par des étapes de miroirs où le cinéaste renvoie Vivian et Elle à leur opposition, leur contradiction, leur image (belle scène d'ascenseur où les portent se referment après une dispute entre les deux femmes, leur visage semblent se refléter l'un après l'autre comme un écho), avec ce pivot qu'est Warren, simple trait d'union entre les deux femmes.

Cette touche de couleur au milieu de l'amphithéâtre universitaire dans le cour de la Professeure Stromwell (Holland Taylor) correspond à ces minorités quelles qu'elles soient qui ne cessent de lutter pour leur représentativité. Je rappelle que La Revanche d'une blonde est une fable et pas un pamphlet politique, c'est sans doute pour cela qu'il se permet d'aller plus loin dans la critique joyeuse et dans l'affrontement entre la brune et la blonde, entre Vivian et Elle, entre la facétie et le sérieux, entre l'est et l'ouest, entre la Californie et la Nouvelle Angleterre.

Regarder La Revanche d'une blonde aujourd'hui prend une tournure plus acerbe par rapport au scandale Harvey Weinstein (qui n'aurait donc jamais voulu produire ce film). Callahan (Victor Garber), l'un des profs de Elle lui promet une ascension rapide dans son cabinet si elle se laisse séduire. Vivian accuse Elle d'avoir accepté cet arrangement. Vivian est elle-même victime du sexisme de Callahan, c'est chaque fois à Vivian qu'il demande d'aller chercher du café. Comme avec Warren, Callahan est l'obstacle entre l'unité de Elle et Vivian.


Je ne veux pas trop raconter le film que je juge magnifique et bourré de scènes fameuses, celles au salon de manucure avec la complexée Paulette (Jennifer Coolidge), le quiproquo avec Emmett (Luke Wilson) et la soirée de Vivian où Elle arrive en Bunny. Le meilleur du film est dans le procès final merveille de construction dramatique et comique. Je reviens à ce que je disais plus haut, rien que pour cette scène de plaidoirie au sujet de chaussures Prada, d'une permanente sur des cheveux bouclés et de Raquel Welch, Reese Witherspoon aurait mérité largement un Oscar de la meilleure actrice.


























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