mardi 15 août 2017

Au gré du courant (Mikio Naruse, 1956)

Quelques mois après avoir perdu son mari et son fils, Rika (Kinuyo Tanaka) part à Tokyo pour se faire embaucher comme bonne par Madame Tsuta (Isuzu Yamada), patronne d’une maison de geishas. Très affable, Rika se voit immédiatement renommer par sa patronne Oharu et commence à travailler : ménage, repas, linge. Elle s’aperçoit vite en allant chez les commerçants du quartier que la maison Tsuta a tant que dettes qu’on lui refuse de faire crédit pour les produits qu’elle veut acheter.

Elle comprend aussi que l’une des geishas, mal payée, quitte la maison en colère. De plus, Otoyo (Natsuko Kahara), sœur de Tsuta vient chaque moi réclamer l’argent prêté. C’est la faillite et Rika découvre en même temps que le spectateur l’état de la maison. L’argent sera l’un des sujets majeurs du film, Tsuta, dans sa sourde fierté, préfère s’endetter plutôt que de suivre les conseils d’une autre geisha et de rencontrer un homme d’affaires qui semble avoir de l’affection pour elle.

Au gré du courant suit la vie de toutes les femmes de la maison, toutes aux caractères différents. D’abord la famille de Tsuta. Sa fille, Katsuya (Hideko Takamine) qui ne sait pas de quoi son avenir sera fait. Elle ne veut pas devenir geisha, cherche en vain du travail et finira par apprendre la couture, ce qui ne plait pas à sa mère qui voit une déchéance sociale. Elle va rencontrer le fils d’un riche homme d’affaires mais ne se sent pas prête à se marier. L’amour semble impossible pour elle compte tenu de la situation.

Ensuite la deuxième sœur de Tsuta, Yoneko (Chieko Nakakita) qui habite au rez-de-chaussée de la maison, qui ne travaille pas mais qui a une fille de six ans, la petite Fujiko pour qui Rika va se prendre d’affection sans doute pour compenser la perte de son propre fils. Yoneko a été quittée par son époux et quand l’enfant tombe malade, son beau-frère viendra apporter un peu d’argent pour la faire soigner. Ensuite, les autres geishas vivant là, la vieille Someka (Haruko Sugimura) et la jeune Nanako (Mariko Okada), qui finira à partir de la maison pour trouver des clients.

Loin d’être un drame continu, le film trouve parfois le ton de la comédie sous un mode ironique. Le personnage de Someka, geisha cinquantenaire sans client est pince sans rire, se moquant de la radinerie d’Otoyo quand elle vient quémander son argent. Someka et Rika partagent beaucoup de secrets, se racontent tout et deviennent complices tandis que la Maison de geishas n’en finit pas tomber dans la déchéance. Au gré du courant est un film essentiellement féminin, les hommes sont rares et souvent lâches ou antipathiques, comme l’oncle de la geisha qui a quitté la maison et qui vient, lui aussi, réclamer l’argent de sa nièce.

Le film quitte rarement la maison créant de plus en plus une atmosphère étouffante au fur et à mesure que les tensions entre ses occupantes s’accentuent. La fierté et l’inconséquence de la patronne finira par causer la perte de sa maison, car comme le dit un des personnages en début de film « madame Tsuta préfère s’occuper de ses chats que de ses filles », ce à quoi elle rétorque qu’une maison de geishas peut paraître enivrante vue de l’extérieur mais elle est horrible vue de l’intérieur et c’est ce point de vue intérieur que Mikio Naruse montre dans Au gré du courant.













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