mardi 13 février 2018

La Belle histoire (Claude Lelouch, 1992)

« Uuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuune histoire, lo laï lo laï lo laï lo laï lo laï lo laï lo laï lo laï lo laï » J'étais allé voir La Belle histoire au cinéma en mars 1992 et j'ai encore la chanson dans la tête (il n'y a guère plus de parole que cela). Certes, depuis sa sortie, j'ai revu le film de nombreuses fois malgré ses 3h15, le plus long film que j'accepte et arrive de regarder en entier sans me lasser malgré son indécrottable mièvrerie et ses effets de manche. Il y a des films qui constituent mon péché mignon et La Belle histoire est mon plus grand péché mignon.

Quelques mois avant la sortie, Claude Lelouch avait accordé aux Cahiers du cinéma son premier (et à ce jour son unique) entretien – c'était pour Il y a des jours et des lunes – où il racontait son envie de filmer les mêmes acteurs sur une dizaine d'années, de frôler leur évolution, dans une grande histoire d'amour aux ramifications multiples dont il a le secret. Au lieu de cela, c'est une histoire d'amour sur 2000 ans, rien que ça. Jacques Brel (La Valse à 1000 temps), Jésus, Marie-Madeleine, des abeilles et la réincarnation, voici les sujets de La Belle histoire.

Jésus, c'est Gérard Lanvin (l'acteur a dit tout le mal qu'il pensait de Claude Lelouch dix ans plus tard dans une interview à Première, il ne jouera plus jamais dans un de ses films) et Marie-Madeleine c'est Béatrice Dalle (elle est revenu dans l'univers de Claude Lelouch pour Chacun sa vie). 2000 ans plus tôt, elle est en admiration devant l'aura de Jésus. Ils sont retenus prisonniers dans une prison troglodyte gardés par des soldats romains. Ils vont nettoyer les lieux avec des boulets enflammés.

La fameuse mélodie de Francis Lai chantée en début de mon texte accompagne toutes les scènes christiques, sans aucun dialogues. Deux camps s'affrontent, les amis de Jésus (Marie-Sophie L. en chasseur de miel, Paul Préboist, Patrick Chesnais) et les méchants romains (Vincent Lindon, Jacques Gamblin, Gérard Darmon). On secoue tout ça, on les empêche de s'aimer, on les massacre, mais leurs âmes vont voyager et tenter de se retrouver, voilà le récit in extenso de La Belle histoire, une histoire de hasards et de coïncidences.

Trois heures pour remettre tout en ordre. Monsieur Tricot (Paul Préboist) explique tout cela aux élèves de Marie-Sophie. Merveilleux discours sur les abeilles. Il claque dans ses mains comme s'il écrasait un insecte, « hop, j'ai tué ma grand-mère ». La réincarnation, une philosophie interdite par le rectorat qui vire Marie-Sophie quand elle l'enseigne à ses élèves. Pas grave, elle se confiera à son papa, un fabricant de marionnettes. Libre comme une abeille, il partira voir du pays et tombera justement sur Jésus Gérard.

2000 ans plus tard, il est gitan (défense de rire devant sa moustache). Son papa (Charles Gérard) était cycliste et a mis enceinte sa maman sur une étape du Tour de France. Tout ce beau petit monde va se retrouver dans un château (après que Jésus ait vendu sa grande roue place de la Concorde). On chante, on danse, on rit, « Uuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuune histoire, lo laï lo laï lo laï lo laï lo laï lo laï lo laï lo laï lo laï ». Marie-Sophie n'est pas celle que recherche Jésus, il le comprend, il va devoir encore voyager dans l'inconnu.

Béatrice Dalle a comme meilleure amie Isabelle Nanty, elles font les 400 coups, elles piquent dans les magasins (tiens, que fait là Jean-Pierre Beauviala, le fondateur des caméras Aaton, le temps d'un plan, observant le larcin et l'arrestation). Deux flics sont au taquet, Jacques Gamblin et Vincent Lindon. Moi spectateur, je sais bien que Lindon ne pourra jamais séduire Béatrice, ils étaient ennemis il y a 2000 ans (preuve documentaire à l'appui), mais il insiste, jusqu'à rencontrer Anémone aux Chiffres et aux Lettres.

A force de faire les 400 coups, Béatrice et Isabelle ont des soucis. Pas rien d'ailleurs, Isabelle se retrouve sur un fauteuil roulant, et c'est parti pour un périple en fauteuil, Béatrice s'éloigne encore plus de Jésus mais va rencontrer un substitut, Patrick Chesnais, rappelons-nous qu'il était compagnon de Jésus 2000 ans plus tôt. Puis, le film tente une ouverture politique vers Israël, Marie-Sophie s'y rend, Patrick Chesnais s'y rend (ils se reconnaissent bien entendu), un attentat a lieu (leur avion explose).


Opera maxima de Claude Lelouch, La Belle histoire est évidemment son plus beau film, émotion à chaque étage (les retrouvailles entre Béatrice et Isabelle), humour à gogo, bons mots d'auteur (celui d'Anémone au cabaret avec Vincent Lindon). Il fera une nouvelle fresque énorme en 1995, Les Misérables du XXe siècle, un désastre, il fera jouer Bernard Tapie sur les hasards et coïncidences, il aura encore des castings mirobolants (Chacun sa vie) mais aucun n'atteindra la réussite de La Belle histoire que je vais continuer à regarder tous les deux trois ans.






























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