mercredi 14 février 2018

Finding Phong (Tran Phuong Thao & Swann Durus, 2015)

En avril 2017, j'avais rapidement écrit sur un documentaire vietnamien Le Dernier voyage de Madame Phung qui évoquait la vie de travestis dans un groupe de forains. On découvrait que c'était la vie d'attractions de foire, pas franchement simple dans un pays encore corseté par ses traditions. Finding Phong est le portrait d'un homme de 30 ans à peine (le tournage a commencé en 2012 et s'est étalé sur trois ans), il vit à Hanoï, loin de sa famille et travaille dans un théâtre de marionnettes.

Les premières images de Phong sont celles d'un journal filmé sur son téléphone portable. Il pleure en gros plan, se lamente sur son sort. La fête du Têt, avec ses feux d'artifice, ne parvient pas à lui donner un peu de joie. Phong, le déclare au spectateur, il est une femme emprisonnée dans un corps d'homme. Il a les cheveux courts, il s'habille encore en homme mais aime se contempler parfois dans un miroir. « Je suis bien foutu » dit-il en petit slip Tommy Hilfiger.

Les deux documentaristes Tran Phuong Thao et Swann Durus prennent le relais du journal intime et filment dans son quotidien Phong. Il répare et rénove les marionnettes, il discute avec ses amies, il va visiter sa mère et son père. Ces derniers sont plutôt âgés. Le père reste silencieux, cheveux et barbe blanches, il fume sa cigarette tandis que la maman exprime ses doutes sur l'opération que Phong envisage de faire.

Le Viet Nam ne permet pas de changer de sexe, c'est donc en Thaïlande que Phong se rend. Un processus long, plus d'une année, pour démarrer par la prise d'hormones pour changer sa physionomie jusqu'à la transformation de son sexe en clitoris et vagin. Phong balbutie l'anglais, tente de se faire comprendre par le médecin thaï et de comprendre ce qu'il dit. Chez lui, il regarde sur Internet des images des opérations à suivre.

A Bangkok, il est en admiration devant deux ladyboys, ces travestis qui conservent leur sexe masculin mais prennent des hormones pour avoir des seins. Il les complimentent, discutent avec elles. Elle se moquent gentiment, avec un grand sourire, de lui. « Je suis une fille », dit-il pendant qu'elles cherchent à toucher son entrejambe. « Tu es un garçon », répondent-elles. Il se considère comme un katoey, un transexuel.

Chronologiquement, le récit suit la transformation. De retour de Thaïlande, Phong commence la prise de pilules. Avec une grande ellipse temporelle, il ne reste que trois pilules à son traitement. Les documentaristes choisissent par cette ellipse de supprimer la charge socilogique. Entre les deux scènes, il s'est passé des mois où Phong a laissé ses cheveux pousser, où il met des robes abandonnant ses pantalons et où il a repris confiance en lui.

Ses amies le soutiennent et le font rire, un médecin lui pose de bonnes questions, sa mère lui souhaite une « route couverte de fleurs ». Mais quand l'opération approche, elle tente de le convaincre de renoncer. C'est là que le papa parle pour la première fois, avec des paroles rassurantes et un soutien qu'il n'attendait plus. « Avant les transexuels étaient dans un piège, maintenant la science peut les aider ».


La dernière partie de Finding Phong se passe en Thaïlande. Son grand frère Cuong l'accompagne pour ce dernier voyage en homme. Phong va enfin se trouver et finir en femme avec un beau et large sourire. Fini en 2015, le film a été montré aux autorités du Viet Nam très rugueuses sur la transexualité afin de changer les lois à leur encontre. Le film sort aujourd'hui dans quelques salles en France.

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