samedi 13 mai 2017

Les Veuves de 15 ans (Jean Rouch, 1966)

Jean Rouch disait ne pas aimer Les Veuves de quinze ans, peut-être parce qu'il aurait préféré ne pas avoir à diriger les deux actrices principales de son court-métrage. Marie-France (cheveux mi-longs)et Véronique (cheveux longs), deux filles à papa vivant confortablement dans la petite bourgeoisie parisienne, ou sa banlieue chic, passent pas mal de temps ensemble. La France est conquise par les idoles, comme autant de fétiches païens, les chanteurs de yéyé. Elles se promènent devant les boutiques où les 33 tours de Johnny, Enrico Macias ou Sheila sont en tête de gondole, les affiches géantes exposent le visage de Claude Nougaro. Mais une fois chez elles, elles écoutent du jazz, dans leur milieu naturel, elles ne sont pas obligées de suivre les goûts des autres.

Elles sont bien sages chez elles. Marie-France habite dans une grande maison entourée d'un vaste jardin. Sa mère reçoit deux amis (deux hommes), ils sont assis dans le salon, la mère envoie rapidement sa fille dans sa chambre faire les devoirs. Véronique vit avec son père, apparemment pas de maman en vue, une bonne a préparé le dîner pour deux mais le papa doit partir en réunion. Pas de problèmes, Véronique lui soutire 10.000 francs pour s'acheter une robe. Elles vont dans le kiosque à journaux acheter des journaux (Le Monde, Elle, Picsou ou Lui). Elles regardent les photos de mode, rêvent de cette « blouse » et passent vite à autre chose. Le langage de l'époque dit avec application par les deux adolescentes fleure bon l'époque et paraît aujourd'hui terriblement désuet.

Les deux demoiselles en rencontrent une troisième (Nadine Ballot), un peu plus délurée et elle croisent deux jeunes hommes, des bons bourgeois eux aussi, en costume cravate, pull posé sur les épaules. Ils sont un peu morveux, envoient des piques aux deux filles mais ils ne cessent jamais de chercher à les revoir, des les inviter aux « surprise party » et de vouloir coucher avec eux. Justement Jean Rouch filme cette boum en images arrêtées, à la Chris Marker de La Jetée, notamment la scène de la coucherie, quasi un viol. Véronique, en descendant les escaliers du Trocadéro, ne se rappelle rien, elle était complètement soûle. Dans la dernière séquence, Maurice Pialat vient jouer un photographe qui sermonne gentiment Véronique sur son avenir. Mais comme le dit bien le titre, elles sont déjà veuves du futur.





















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