jeudi 20 avril 2017

Je danserai si je veux (Maysaloun Hamoud, 2016)

Dans les salles de cinéma ou devant un DVD, les films se suivent et ne se ressemblent pas. Parfois, il suffit de quelques minutes pour être pris, emporté et se rendre compte que le film nous regarde. Passer de l'horrible navet qu'est Life réalisé par un Suédois à Je danserai si je veux premier film franco-israélien tourné par une Palestinienne est une liberté qui me plaît et qui, j'espère, ne disparaîtra après ces tours, fort incertains, de l'élection présidentielle. Avoir l'embarras du choix (et je ne parle pas des 11 candidats) est un luxe. Voilà pour ma diatribe un peu simpliste mais bien sincère.

Se faire emporter dès le générique donc. Il faut le décrire. De la chanson pop, un peu R 'n B interprété par la chanteuse Dam, les noms des actrices apparaissent en anglais et en arabe, imprimés aux couleurs du drapeau palestinien rouge, vert et noir. Et ce titre français à la première personne. Ce Je qui s'adresse au spectateur à quel personnage correspond-il ? En anglais « In between » donne une autre idée, celle de la marge, de l'entre-deux, de la transition. Ce Je est sans doute pour Nour (Shaden Kanboura) qui arrive, avec sa grosse valise, dans l'appartement que partagent Laïla (Mouna Hawa), cheveux joliment bouclés, et Salma (Sana Jammelieh), à l'anneau au nez.

Trois femmes colocataires dont Maysaloun Hamoud va faire un portrait croisé, par petites touches, comme autant de saynètes de tons variés, comédie, drame, familial, amoureux, politique parfois. D'abord un petit point sur leur boulot. Laïla est avocate dans un tribunal de Tel Aviv, où se déroule le film, indomptable, elle règle parfois ses cas sur le parking en fumant sa clope. Salma fait des petits boulots de cuistot (où elle se fait virer pour avoir parler en arabe) ou de barmaid (où elle peut draguer). Nour est encore étudiante et veut réviser pour ses examens au calme. Il n'est pas certain qu'elle ait choisi le bon appartement.

Les deux colocataires de Nour jouissent de la plus grande liberté possible à Tel Aviv. Liberté amoureuse en tout premier lieu, Salma est lesbienne et craque sur Dounia (Ahlam Canaan), cliente du bar où elle bosse. Laïla sort avec le très beau Ziad (Mahmud Shalaby) qui traîne des pieds dans leur relation. On remarquera que c'est toujours Laïla qui conduit la voiture quand elle transporte Ziad et qu'elle porte souvent des costumes d'homme, sans doute pense-t-il qu'elle porte trop la culotte. Et le soir, les deux amies font la fête, chez elles, au bar, en boîte de nuit.

Nour n'a jamais encore goûté à une telle vie. Elle vient d'une petite ville palestinienne et l'installation à Tel Aviv ne plaît pas à Wissam (Henry Adrawes) son fiancé, il fera tout pour qu'elle quitte ces lieux, qu'elle avance leur mariage, qu'elle arrête ses études. Il sortira un verset du Coran pour la convaincre, elle baisse les yeux, mais rien n'y fera, elle restera à Tel Aviv. Quand elle l'invite, il ne serre pas la main des autres filles, il les traite de dévergondées, il accuse Nour d'avoir changé.

La cinéaste s'intéresse à Nour car elle cristallise les relations des deux autres jeunes femmes avec leur famille respective. Laïla, chrétienne de la province nord, revient chez ses parents qui se trouvent être aussi intolérants que Wissam. Si j'ai souvent ri au début du film, le ton se fait plus sombre dans sa deuxième moitié, presque tragique. Plutôt que de se complaire dans le feel good movie ou le drame absolu, Maysaloun Hamoud choisit l'entre-deux et finit dans l'expectative avec les trois amies qui nous regarde. Cette image servira à illustrer l'affiche française.

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