samedi 9 juillet 2016

La Machine (Paul Vecchiali, 1977)

Depuis Change pas de main, vu fin mai, j'ai regardé deux autres films de Paul Vecchiali, L'Etrangleur puis Nuits blanches sur la jetée. Je les ai copieusement détestés tous les deux. J'ai cependant remarqué le jeu et le physique très similaires de Jacques Perrin et Pascal Cervo, comme quoi en 44 ans, le cinéaste ne change pas de style. Je retente avec La Machine, film très impressionnant de maîtrise formelle sur un sujet toujours aussi brûlant, la peine de mort. Mais pas seulement, Paul Vecchiali aborde bien d'autres choses dans son film qui sont un peu écrasés par le thème principal.

La parti pris formel est de constituer le film en cinq blocs qui vont du poétique au sordide, soit une descente aux enfers pour Pierre Lentier (Jean-Christophe Bouvet), jeune ouvrier de Maisons-Alfort qui commet un crime horrible et se voit condamner à mort. Les premiers plans sont dévolus à son travail qu'on imagine harassant, une usine de sidérurgie, du bruit, de la chaleur. Mais l'ambiance est bonne. Lentier vit avec sa mère Jeanne Dumont (Sonia Saviange), divorcée depuis longtemps. Elle travaille dans une crèche. Lentier, de dos, veste à carreaux rouges et noirs, observe les enfants en bord de Marne.

Dans cette première partie de présentation de Lentier, de son environnement, de sa vie familiale, qui n'a pas valeur d'explication de son geste, le long plan séquence du café rappelle le réalisme poétique. Dans ce café, des Titis parisiens, des grandes gueules, des timides, des vieux, des jeunes, des femmes et des hommes. On reconnaît Marie-Claude Treilhou, Michel Delahaye ou Jean-Claude Guiguet. Chacun se donne un surnom. Ils discutent de la vie, se chamaillent joyeusement. Soudain, une chanson triste se joue sur le juke-box et un couple entonne de concert le refrain, comme dans une comédie musicale.

La présentation de ce groupe pourrait paraître gratuite. Au contraire, elle va s'inclure dans le deuxième bloc narratif. Paul Vecchiali ne filme pas le crime de Lentier. Il passe directement du plan de la Renault orange au gros titre du journal. La machine médiatique est lancée. Gérard Blain ou Noël Simsolo jouent des reporters télé qui vont interroger des témoins (dont Jean-Claude Biette) et questionner les amis de Lentier (dont ces gens du café). Le cinéaste filme le poste de télé qui diffuse ces interviews, il cadre les unes des journaux de plus en plus sensationnalistes. L'opinion publique a tôt fait de condamner à mort Lentier, selon la presse.

Au cas où douterait de l'opinion de Paul Vecchiali, il apporte une réponse claire et nette. C'est lui-même qui joue l'avocat de Lentier. Lors du bloc consacré à la reconstitution du crime, de la voiture jusqu'à l'usine désaffectée où la fillette est morte, l'avocat s'oppose régulièrement à la juge d'instruction (Monique Mélinand). Lentier semble d'abord sans émotion, regard froid, gestes mécaniques. Plus la reconstitution se précise, plus la tension s'affirme. Lentier finit par craquer devant la marionnette qu'il doit frapper d'une brique.

Ce que montre La Machine, la machine médiatique, la machine judiciaire, la machine guillotine, je ne l'avais vu dans aucun film. D'habitude, on voit le crime, la chasse au meurtrier et le procès mise en scène de la même manière, comme un thriller bourré de pathos. L'évaluation psychologique de Lentier tourne au comique : les quatre psychiatres semblent confus devant les propos de Lentier. Le procès est réduit à sa portion congrue avec une plaidoirie sur la sexualité des enfants qui a dû faire grincer bien des dents. L'enchaînement des faits est d'une grande rigueur.

























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