dimanche 17 juillet 2016

Beetlejuice (Tim Burton, 1988)

A peine décédé, le couple Maitland, Adam (Alec Baldwin) et Barbara (Geena Davis), apprend qu'il va devoir hanter sa propre maison pendant 125 ans. Tim Burton expédie les présentations des jeunes mariés. Une petite bourgade perdue dans le Connecticut, un charmant couple qui se fait des mamours dans le grenier où Adam a construit, avec minutie, une maquette du village, des courses au volant de leur break, et hop, à cause d'un gentil toutou qui se trouvait là, les Maitland meurent noyés.

De la même manière, Beetlejuice ne prolonge pas le suspense pour qu'Adam et Barbara se rendent compte, miroir à l'appui où ils ne voient pas leur reflet, qu'ils sont devenus des fantômes. Adam tente de sortir de la maison. Il découvrira que l'extérieur est désormais un vaste désert de sable peuplé d'un serpent qui cherche à l'engloutir. Un serpent rayé en animation image par image, à l'ancienne. Pourquoi vouloir s'enfuir à toutes jambes ? Parce qu'une nouvelle famille a acheté leur maison et s'y installe.

Il est évident que Tim Burton s'intéresse plus à cette nouvelle famille qu'aux gentils mais insipides Maitland. Le père Charles Deetz (Jeffrey Jones), un homme d'affaires venu s'installer là dans l'espoir d'investir dans le village comme lieu de villégiature des New-yorkais. La mère Delia Deetz (Catherine O'Hara), une hystérique rousse qui se prend pour une artiste, elle crée des sculptures en métal, horribles et difformes. Et la fille Lydia (Winona Ryder), tout en noir, gothique dépressive qui traîne sa mélancolie armée d'un appareil photo.

Delia a décidé de refaire la déco de la grande maison. Adieu les papiers peints anciens, bonjour les couleurs mauve et verte, au revoir les meubles en bois, bienvenues les chaises et tables à la mode et grises. Avec l'aide de son ami grassouillet Otho (Glenn Chadix), prétendu architecte, prétentieux et imbu de sa personne, elle parcoure les couloirs, menton en l'air, inspirée comme une artiste d'art contemporain forte de son goût. Tim Burton se moque gentiment de ces parvenus, de leur kitsch clinquant, de leur faute de goût, sous le regard navré de Lydia qui porte le point de vue du cinéaste.

Lydia sera la seule à voir les Maitland, cachés dans le grenier. Elle veut les rencontrer. Adam et Barbara avaient superficiellement feuilleté le « Manuel pour les nouveaux défunts » et lu que les vivants ne peuvent pas les voir. Sauf Lydia, intriguée, qui s'affirme comme une personne spéciale. Elle les prendra en photo lors d'une nuit où, revêtus de draps chic à 300$ pièce, ils tentaient de faire peur aux Deetz. Le père croit que c'est Lydia qui fait une farce, la mère a avalé un somnifère et Lydia n'a pas peur. Bien au contraire.

Ils tentent de jour d'effrayer Delia. Elle continue de modifier la maison. L'un des meilleurs gags de Beetlejuice montre Delia et Otho ouvrant les placards. Barbara est caché dans l'un d'eux. Quand Delia ouvre la porte, Barbara s'arrache le visage devant elle. Delia et Otho hurle de peur. Barbara croit avoir gagné la partie. Mais l'apprentie artiste et son ami criaient, non pas à cause du visage défigurée du fantôme, mais parce que la taille du placard est minuscule à leurs yeux. Coup d'épée dans l'eau pour les Maitland.

Quelqu'un veut absolument les aider. Betelgeuse (Michael Keaton). En début de film, Betelgeuse est filmé uniquement de dos, lisant la rubrique nécrologique du journal des fantômes. « Gentils mais stupides », se dit-il quand il voit les Maitland. Il va pouvoir les manipuler. Coincé dans la maquette du village du grenier, il attire l'attention du couple. Il fait clignoter une maison de la maquette, lance une publicité dans le vieux poste télé et glisse dans le manuel des morts une annonce pour qu'ils fassent appel à lui.

Michael Keaton, alors essentiellement connu pour sa série comique à la télé, s'en donne à cœur joie dans le cabotinage, débitant ses répliques à toute vitesse. Son personnage met du temps à arriver dans le film, mais chaque apparition est plus hilarante que la précédente. Les cheveux hirsutes approchant le verdâtre, le visage blanc et les yeux cernés de rouge, il se présente comme un bio-exorciste diplômé, le seul capable de chasser les Deetz. Pour qu'il puisse agir, son nom doit être prononcé trois fois de suite. « Beetlejuice, Beetlejuice, Beetlejuice » et le charme sera lancé.

Adam et Barbara s'en apercevront vite, les méthodes de Beetlejuice ne sont pas les plus pacifiques du monde. Il se transforme en serpent géant et effraye les Deetz avec violence. Les intentions de Beetlejuice ne sont pas gratuites. Malgré toutes ses blagues et son boniment, il cherche à sortir du purgatoire dans lequel il est enfermé depuis des siècles. Les méfaits du bio-exorciste sont repérés par les instances de l'au-delà et leur intendant en chef, une vieille dame prénommée Juno (Sylvia Sidney) qui vient, clope au bec et fumée qui sort de sa gorge, sermonner les Maitland.

La beauté et l'originalité de Beetlejuice tient dans l'univers des morts inventé par Tim Burton. Loin des espaces nuageux et bleutés des films de fantômes se rendant au paradis (exemple typique dans toutes les mémoires, Le Ciel peut attendre de Warren Beatty), Tim Burton propose un au-delà cohérent, ludique et inventif. Si le couloir est inspiré du Cabinet du Docteur Caligari, son parquet en carrés noirs et blanc raccordant, ironiquement, avec la chemise d'Adam Maitland, l'au-delà de Beetlejuice s'aventure vers une autre cosmogonie.

L'au-delà que visite les Maitland est une salle d'attente comme dans n'importe quelle administration du monde où l'on prend son ticket en attendant son tour. Sauf qu'ici, l'attente peut prendre des siècles. Assis dans la salle, de nombreux morts, un chasseur de safari à la tête réduite, l'assistante d'un magicien coupée en deux, un pêcheur de requin encore encastré dans la mâchoire du prédateur. Ou encore toute une équipe de football américain d'une grande stupidité qui harcèle Juno de questions, elle est prise pour leur coach.

Juno gronde les Maitland de n'avoir pas lu correctement le manuel, puis elle les réprimande pour avoir fait appel à Betelgeuse, son ancien assistant démoniaque et délirant. Ces séquences comptent parmi les meilleurs du film. Elles seront suivies du grand numéro de Betelgeuse, portant un chapeau en forme de carrousel, des oreilles en chauve-souris et transformant ses bras en marteaux gigantesques pour terrifier les Deetz. Le scénario est souvent bancal mais toujours très amusant, à l'image des danses surnaturelles sur les chansons exotiques d'Harry Belafonte.

























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