vendredi 1 avril 2016

Quand on a 17 ans (André Téchiné, 2016)

Avec André Téchiné, on sait toujours assez vite où l'on va. L'affiche de Quand on a 17 ans montre, sans détour, la relation entre les deux garçons, des lycéens qui vont passer le bac. A gauche, Thomas (Corentin Fila) les yeux légèrement dans le vague, à droite Damien (Kacey Mottet Klein) qui regarde Thomas, et derrière eux Marianne (Sandrine Kiberlain) qui observe les deux ados. Elle est la mère de Damien, elle est médecin et c'est en allant soigner la mère adoptive de Thomas qu'elle décide de les réunir, même s'ils n'en demandaient pas tant.

Ce qui compte plus chez Téchiné ce n'est pas l'aboutissement d'une histoire d'amour entre Thomas et Damien, rugueuse et violente, qui s'épanouira comme on s'en doute bien, que les chemins, les bifurcations et les embûches pour y arriver. Dans Les Roseaux sauvages, sa première vraie histoire d'amour entre adolescents, les rivières du Tarn sinueuses et printanières servaient de parcours, dans Quand on a 17 ans, ce sont les montagnes enneigées des Pyrénées qu'il faut gravir et dépasser pour s'aimer.

Deux modes de vie s'opposent. Thomas vit dans une ferme de montagne avec ses parents adoptifs. Après avoir aidé son père à nourrir les vaches, il fait une bonne heure de marche dans la neige, prend le bus et arrive au lycée. Damien vit avec sa mère dans une villa, son père (Alexis Loret, de retour chez Téchiné 18 ans après Alice et Martin) est un militaire chez « les barbus » comme il le dit. Damien a une vie plus calme, plus bourgeoise. Au lycée, les deux gars ne peuvent pas se sentir et se tapent sur le gueule dès qu'ils le peuvent.

Ce que montrent bien ces coups, ces croche-pattes, ces regards haineux, c'est l'incapacité des deux garçons à comprendre ce qui les lie. Ce que les deux personnages ne comprennent pas, pas plus que les parents d'ailleurs, on peut les voir comme des préliminaires à la scène de sexe, hélas moins tenue, des préliminaires violentes mais filmées avec une grande douceur et une certaine distance. Thomas dit qu'il a peur d'aimer Damien, ce dernier n'est pas certain de savoir s'il aime les mecs ou seulement Thomas.

Dans l'une des plus belles séquences, Damien demande à Thomas de l'emmener se faire soigner l'un des bleus qu'il a reçu après qu'ils se soient battus. Damien au téléphone se fait guider par l'homme qu'il va voir, une sorte de rendez-vous coquin. Damien est incapable d'aller plus loin, mais Thomas va discuter avec cet homme trentenaire, exploitant agricole, qui va tout lui raconter sur sa ferme, bien différente de celle de son père. Cet homme sert de relais à l'amour entre Damien et Thomas, avec une économie de dialogues bienvenue.

Tout ce qui pouvait paraître parfois démonstratif dans les films d'André Téchiné, avec ses tunnels de dialogues explicatifs, ses atermoiements romantiques, sont balayés. Quand Damien, lors d'une révision pour un bac blanc, sort des diatribes extraites du Banquet de Platon, Thomas se contente de répliquer à son pote qu'il avait compris, qu'il est « balourd ». L'apport de Céline Sciamma est indéniable dans le scénario, plus pudique, plus elliptique, que celui que Gilles Taurand avait pu apporté dans ses collaborations avec le cinéaste.

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