dimanche 13 mars 2016

Room (Lenny Abrahamson, 2015)

La première heure de Room est réussie. Lenny Abrahamson parvient à dilater l'espace-temps en faisant de l'enfant dont on entend la petite voix son narrateur. « Bonjour chaise N°1, bonjour table, bonjour chaise N°2 », l'enfant énumère les objets qui se trouvent autour de lui, on découvre cette pièce qui semble comme toutes les chambres d'enfant, dessins au mur, petit lit. Pour un enfant de cinq ans, la pièce est spacieuse. L'enfant se prépare pour le petit déjeuner avec sa maman. Les prénoms ne sont pas employés. L'enfant a de très longs cheveux comme sa mère et se trimbale dans la pièce en sous-vêtements, plus commode pour faire quelques étirements en poussant la table et en roulant le tapis.

Si le spectateur ne sait pas de quoi il retourne dans Room, la découverte que cet enfant que sa mère appelle Jack (Jacob Tremblay) est un garçon provoque une petite surprise. La deuxième surprise arrive quand on découvre que cette mère (Brie Larson, Oscar de la meilleure actrice pour ce rôle), appelée par son fils « Ma » est prisonnière d'un homme depuis des années. Ce jour-là, Jack a son anniversaire avec un gateau. Il ignore ce qu'est la notion du temps, il est né en captivité, et une semaine, une année ou une heure, c'est la même chose quand chaque jour, les mêmes gestes et actions sont répétés et qu'aucune contrainte de temps ne vient empêcher l'accomplissement de ces gestes et actions.

Room est un curieux mélange entre Le Sous-sol de la peur de Wes Craven et Première sortie de Hugh Wilson, un film oublié de 1998 où Brendan Fraser découvrait le monde après avoir vécu toute sa vie dans un abri anti-atomique. Le monde que la maman a patiemment créé pour Jack, cette cosmogonie minuscule destinée à éviter que le fils ne soit confronté à Old Nick (Sean Bridgers), l'ogre qui les retient prisonniers et qui, comme dans tous les vrais contes, est cruel. Quand le bourreau débarque, Jack doit se cacher dans le placard et ne voit de cet homme que des ombres à travers les entre-bâillements de la porte.

Ce monde s'écroule quand Jack parvient à s'échapper de la cabane. Ce que sa mère appelle le dehors « the world » dans les dialogues anglais, n'existait jusque là que grâce à la télévision sans cesse allumée et un carré de ciel bleu visible du velux. Las, le film ne tient pas les promesses de la première heure. Lenny Abrahamson utilise des effets visuels superflus : ralentis, flous, musique, tout dramatise à outrance la nouvelle vie de Jack et sa mère. Mention spéciale de cabotinage à William H. Macy dans le rôle du grand-père inapte à regarder Jack dans les yeux. Le cinéaste se force à rester pudique, comme il l'était dans la cabane, mais cela apparaît cette fois contre-productif.

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