dimanche 27 mars 2016

Au nom du peuple italien (Dino Risi, 1971)

Le juge Bonifazi (Ugo Tognazzi) rend la justice au nom du peuple italien. Un immeuble sans permis de construire : une amende et de la prison pour le promoteur et destruction à l'explosif de l'immeuble. Bonifazi ne transige pas, il regarde l'air impassible le bras droit de la justice agir. Affaire suivante ! En l'attendant, le petit juge célibataire, qui se déplace en mobylette et qui n'aime pas le foot, à peine un Italien donc, part à la pêche. Pas de chance pour lui, il se rend compte qu'une usine déverse ses eaux non traitées dans la rivière, les poissons flottent, tous crevés.

L'affaire suivante tourne autour de la mort d'une jeune femme prénommée Silvana. Le médecin légiste, très sûr de lui, voulant faire ravaler sa morgue au petit juge (« tu n'y connais rien ») affirme qu'elle a reçu des coups et qu'elle a été assassinée. Bonifazi convoque les parents qui délivre un nom. Mais ce nom fait trembler les murs du palais de justice, au sens propre comme au sens figuré. Ce nom est celui du promoteur du nouveau palais de justice qui menace de s'effondrer et c'est un ami du ministre de la justice.

L'ingénieur Lorenzo Santenocito (Vittorio Gassman) est l'Italien pur sucre. Hâbleur, se déplaçant à toute vitesse dans une voiture sportive et infidèle à sa pauvre épouse Lavinia (Yvonne Furneaux). Lorenzo est un industriel qui veut faire des affaires sans trop se soucier des lois, règlements et contraintes. Il a le soutien des politiques comme de ses pairs, ce qui lui permet de ne pas être inquiété quand une forêt est détruite dans un incendie pile là où il voulait un centre commercial, pour le bien du plus grand nombre, évidemment.

Le petit juge taiseux ne veut pas l'épingler pour sa roublardise, sa richesse et son priapisme, enfin pas seulement. Il lui en veut secrètement d'avoir détruit son petit coin de pèche. Et l'homme va payer, à grands coups d'humiliation publique. Arrestation lors d'une soirée déguisé, Lorenzo est en empereur romain, histoire d'appuyer sur la décadence que subit la société italienne dans ce débuts des années 1970. Interrogatoires où l'industriel crie au complot et clame son innocence dans le meurtre de cette jeune femme.

Ugo Tognazzi et Vittorio Gassman étaient tous les deux des monstres de la comédie italienne. Ils ne s'étaient plus croisés dans un film depuis La Marche sur Rome en 1962, et accessoirement dans Les Monstres, du même Dino Risi. Leur confrontation dans Au nom du peuple italien produit un effet dialectique qui pose la question suivante : qui est le plus sympathique aux yeux du spectateur ? Le baratineur qui escroque son monde ou le justicier donneur de leçons ? Depuis longtemps, l'Italie a choisi Guignol plutôt que le Gendarme, comme partout ailleurs.














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