mercredi 27 janvier 2016

45 ans (Andrew Haigh, 2014)

A priori, 45 ans est totalement différent de Weekend, le précédent film d'Andrew Haigh. Jouons au jeu des différences. Dans Weekend, deux hommes, jeunes trentenaires, se rencontraient dans un bar, passaient la nuit ensemble à faire l'amour. Tout se passait à Londres et ils étaient confinés dans un petit appartement ou dans des cafés. Dans 45 ans, Geoff (Tom Courtenay) et Kate (Charlotte Rampling) sont mariés depuis 45 ans. Ils vivent dans une immense maison au beau milieu de la campagne de Norfolk.

Mais comme disait l'autre (Serge Daney), c'est la même chose, sauf que c'est l'inverse. Dans les deux films, Andrew Haigh met un compte à rebours, les deux amants de Weekend savent que leur aventure amoureuse va se terminer quelques jours plus tard. L'un des deux est Américain et doit rentrer chez lui. Dans 45 ans, la semaine va s'égrainer du lundi au samedi, c'est ce dernier soir que Kate et Geoff doivent fêter leur anniversaire de mariage, en grande pompe et avec tous leurs amis et connaissances.

La journée se déroule toujours de la même manière. Le matin Kate va promener le berger allemand nommé Max. Puis, elle prend le courrier tandis que Geoff lit tranquillement en l'attendant. Et ce jour-là, une lettre est adressée à Geoff. Elle est en allemand, elle vient de Suisse, sa mémoire de la langue de Goethe est un peu défaillante mais il comprend que Katya, qu'il a connu en 1962, juste avant son mariage avec Kate, est morte. Plus précisément, son corps a été enfin découvert, drainé depuis des années par un glacier des Alpes suisses.

Le petit grain qui va mettre à mal le couple, est que Kate n'a jamais entendu parler de cette femme. Elle a bien compris que le prénom est très proche, trop proche pour elle. C'est tout un pan de l'histoire de son mari qu'elle découvre. Il n'ose pas dire qui elle est. Quand son comportement change et qu'il se remet à fumer, elle comprend qu'elle était la fiancée de Geoff. Les révélations sont emmenées délicatement par le cinéaste, sans engueulade monumentale. C'est là qu'on voit la différence avec certains films sur les secrets familiaux enfouis.

Tout le film repose sur le talent de Charlotte Rampling, et plus encore sur son regard pénétrant et inquiet sur l'avenir de son couple. Cet avenir qui doit être célébré ce week-end pourra-t-il résister à ce fantôme du passé ? Comme dans Weekend, ou dans sa formidable série Looking sur HBO, les dialogues sont très soignées et d'un naturel confondant. Mais la volonté du cinéaste de sortir de la fiction gay semble, dans certaines scènes, avoir pétrifié et anesthésié son cinéma.

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