lundi 2 novembre 2015

Le Génie du mal (Richard Fleischer, 1959)

 
Le film noir psychologique a eu son heure de gloire. Il s'agissait d'analyser les racines du mal par la psychiatrie. De manière littérale avec un médecin qui explique la psychose de Norman Bates chez Hitchcock ou de manière plus détournée quand un journaliste enquête (Le Mur invisible d'Elia Kazan, L'Invraisemblable vérité de Fritz Lang) et souvent tout simplement en s'immergeant dans un asile de fous, comme on ne dit plus (La Toile d'araignée de Vincente Minnelli ou Shock corridor de Samuel Fuller).

Dans Le Génie du mal, l'analyse psychiatrique passe par le film de procès et la présence de Jonathan Wilk (Orson Welles qui n'arrive que dans le dernier tiers bien que son nom apparaisse le premier au générique), l'avocat de deux jeunes génies, Judd Steiner (Dean Stockwell) et Artie Strauss (Bradford Dillman) accusés du meurtre d'un adolescent. Le film se passe à Chicago en 1924 dans un milieu très fortuné. Mais avant le procès et la plaidoirie du personnage d'Orson Welles, Richard Fleischer présente ces deux amis.

Judd est le plus jeune (18 ans), porte toujours une cravate et garde constamment un air sérieux. En cours, il contredit sans cesse son professeur, citant Nietzsche comme référence ultime et vivant au milieu des animaux empaillés. Il ne s'entend pas avec son frère Max qui lui reproche son amitié avec Artie, 19 ans, qui lui porte un nœud papillon. De tempérament jovial, il a le sourire large et moqueur. Contrairement à Judd, Artie a beaucoup d'amis avec qui il sort en boite de nuit écouter du jazz, il boit de l'alcool malgré la prohibition.

Les deux jeunes hommes ont des rapports controversés et on imagine qu'il est difficile pour un film de 1959, comme pour Alfred Hitchcock avec La Corde en 1948, de décrire ce qui se passe entre eux. Les regards qu'ils se lancent (Dean Stockwell joue très intensément), leur relation exclusive (Judd n'a pas d'autres ami que Artie et refuse de le partager) et l'autorité qu'exerce l’aîné sur son cadet (qui attend qu'Artie lui ordonne d'accomplir ses actes) ont tout des rapports amoureux. Quand Judd tente de séduire une fille, il affirme qu'il ne peut pas et file rejoindre Artie.

On ne verra jamais le crime qu'ils commettent, tout reste hors champ. Ils le commettent au nom de leur super intelligence, ils se considèrent comme des hommes supérieurs et à ce titre ont le droit de le faire. Telle est leur explication d'une arrogance folle. Artie joue même avec le feu, allant à la rencontre des enquêteurs et du procureur. Il joue au chat et à la souris avec eux, et bien-entendu, il pense être le chat. Le procureur (E.G. Marshall) est de la même trempe et tend un piège aux deux garçons qu'il espère voir au bout d'une corde.

Le finale est un plaidoyer contre la peine de mort, ce qui en 1959, relève de l'exploit. Cette fin est entièrement consacrée au procès, avec pratiquement uniquement Orson Welles à la barre sans être vraiment contredit par le procureur, le réalisateur choisit son camp. D'autant qu'Orson Welles joue un avocat que l'on présente comme athée, autre abomination pour l'époque, presque pire qu'être communiste. C'est ce qui s'appelle un film progressiste, même si la démonstration ne se fait pas parfois sans une certaine lourdeur et des arguments massue.
















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