samedi 17 octobre 2015

Crimson Peak (Guillermo del Toro, 2015)

Enfant, Edith (Mia Wasikowsksa) a reçu la visite fantomatique de sa mère qui lui a dit de se méfier de Crimson Peak, la colline cramoisie. Cela a dû la marquer, car adulte elle ambitionne de devenir écrivaine. Non pas comme Jane Austen, la célibataire endurcie qui a écrit des nouvelles romantiques, mais comme Mary Shelley, la croqueuse d'hommes qui a inventé le gothique anglais. Elle va pourtant se laisser marier par Thomas Sharpe (Tom Hiddelston), un baronnet qui représente tout ce qu'elle déteste. Qui plus est, cet aristocrate est un intriguant qui cherche de l'argent pour extraire et vendre son argile. Le film se fait souvent une critique acerbe du capitalisme sournois. Mais les opposés s'attirent et elle abandonne celui qui est amoureux d'elle, le fringuant Alan McMichael (Charlie Hunnam), l'employé de son père. Elle quitte son Amérique natale pour le sinistre Cumberland. Le château des Sharpe est délabré. Le toit est en lambeau et des feuilles, puis la neige tombe sur le sol de l'entrée. Dans Crimson Peak, le château est aussi vivant que les fantômes qui encombrent les couloirs. La demeure est construite sur de l'argile rouge comme le sang, qui coule et se répand partout. Le château est aussi effrayant que la sœur de Sir Thomas. Lady Lucille (Jessica Chastain) règne en maîtresse de maison, aussi terrible que la femme de chambre de Rebecca d'Alfred Hitchcock. Chez Guillermo del Toro, la monstruosité est moins chez les revenants que chez les aristocrates engoncés dans leurs costumes étriqués de cette Angleterre victorienne. Les fantômes, ectoplasmes volants, sont dessinés comme des peintures animées, le sang volette comme lancé par un coup de pinceau. Dire que le film est sublime est un doux euphémisme. C'est tout un code de couleurs que Guillermo del Toro développe, la neige maculée de rouge, les cheveux blonds contre les cheveux noirs, les fantômes noirs et les fantômes rouges. Les secrets, tous plus atroces les uns que les autres, enfouis dans l'argile seront révélés petit à petit à cette pauvre Edith qui assume dans Crimson Peak le rôle du narrateur innocent.

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