lundi 21 septembre 2015

N.W.A - Straight Outta Compton (F. Gary Gray, 2015)

Jusqu'à présent, les films de F. Gary Gray pouvaient être classés dans deux catégories, le film d'action cool (Braquage à l'italienne, Be cool) et le film d'action primaire (Un homme à part, Que justice soit faite). Je préfère la première catégorie. N.W.A - Straight Outta Compton n'est pas vraiment un film cool mais réussit à être intéressant jusqu'à la toute fin. C'est quelques années de la vie du groupe de rap que le cinéaste visite, de la rencontre entre les membres de NWA en 1986 jusqu'à la mort de Eazy-E en 1995. C'est une première différence avec les biopics musicaux récents, sur Johnny Cash, Ray Charles ou James Brown qui mettent en scène toute leur vie, ou explorent au moins plusieurs décennies. Cela dit, il s'agit ici d'un groupe à la durée limitée. F. Gary Gray ne se démarque cependant pas beaucoup de ses confrères et le film montre l'ascension du groupe, la vie privée de ses membres, les destins croisés. Le film reste relativement académique dans son traitement avec une reconstitution sans défaut et appliquée de l'époque.

Parce qu'il est produit par Ice Cube, Dr. Dre et Tomica Woods-Wright (la veuve d'Eazy-E), tout le récit tourne autour de Ice Cube, Dr. Dre et Eazy-E. Logiquement. Pour n'avoir pas connu à l'époque NWA et n'avoir jamais entendu un seul morceau, je ne peux pas dire si cela reflète la réalité. Mais peu importe, N.W.A - Straight Outta Compton n'est pas un documentaire, c'est une œuvre de fiction. Ice-Cube (O'Shea Jackson Jr, soit le fils d'Ice Cube) est un lycéen comme les autres qui observe les exactions policières dans son quartier de Los Angeles. Il subit lui-même une arrestation arbitraire. Son personnage est un auteur de paroles de génie, qui sait parfaitement décrire la situation des Afro-Américains en ce milieu des années 1980. Régulièrement, la police tente de censurer ses morceaux (elle intervient en plein concert à Detroit quand il interprète Fuck Tha Police). On vit l'affaire Rodney King comme si on y était. Il se sent floué par le manager du groupe Jerry Heller (Paul Giamatti, qui en fait un peu trop), il se sent exploité parce que ses paroles sont chantées par Eazy-E et qu'il ne touche pas assez d'argent.

Dr. Dre (Corey Hawkins) est l'arrangeur du groupe. Autant Ice Cube est violent dans ses propos, autant Dr. Dre est calme. Tout ce qu'il veut est pouvoir mixer. Il s'accommode du contrat qui le lie à Heller, tout du moins dans la première partie du film. Eazy-E (Jason Mitchell) ne rêve que de pognon. Mauvais chanteur, il va parvenir cependant à devenir le leader du groupe avec la chanson Boyz N The Hood. Avec Heller, il va fonder un label, Ruthless (« impitoyable ») et s'arroger le magot. Pendant qu'Eazy-E et Heller mangent du homard, les autres doivent se contenter de burgers, lui sort Ice Cube en colère. Sa cupidité est montrée sans ambages ni nuances jusqu'à une rédemption finale un peu douteuse. Bref, Ice Cube et Dr. Dre ont plutôt les beaux rôles. Reste à évoquer les concerts qui ponctuent le film. Ils sont remarquablement bien présentés (les enjeux face à leurs paroles) et mise en scène à grands coups de larges mouvements de caméra. Sur un grand écran, c'est impressionnant. Pas étonnant que le film ait eu un tel succès, à la grande surprise de chacun, aux Etats-Unis. C'est un peu le rêve américain qui est décrit, même si ce rêve avait souvent des allures de cauchemar. Et il faut dire que pas grand chose n'a changé en 25 ans.

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