mercredi 19 août 2015

Frank Borzage, mon Top 5

Patrick Brion prononce son nom « borzèdj » quand il présente ses films au Cinéma de Minuit sur France 3. En américain, on l'appelle « borzégui » puisqu'il est d'origine italienne. Quoi qu'il en soit, Frank Borzage a tourné pendant ses quarante ans de carrière une bonne douzaine de très grands films et au moins cinq chefs d’œuvre, à chacun de choisir les siens. L'unique sujet de ses films est le couple, comment il se rencontre, comme il se forme et comment il résiste aux contraintes. Voici mon Top 5.

L'Heure suprème (7th Heaven, 1928)
Janet Gaynor et Charles Farrell ont tourné dans trois des meilleurs films muets de Borzage. Le cinéaste filme des gens pauvres avec grande empathie mais sans démagogie. L'histoire d'amour va être désintégré par la guerre, la première celle de 1917. Le film est clairement anti-militariste (la guerre mène à la folie), mais aussi anti-clergé (le curé est un sacré hypocrite). Il est rare de voir à Hollywood un anarchiste comme Borzage. Il réitérera avec Lucky Star et L'Ange de la rue.

Bad Girl (1931)
Bad Girl a donné à Frank Borzage un Oscar du meilleur metteur en scène. Il choisit d'améliorer ce qu'il avait raté dans Liliom, son film précédent, soit montrer comme l'insouciance peut parfois ruiner un couple. Elle (Sally Eilers) rencontre lui (James Dunn) sur une péniche. Elle ne veut pas se laisser séduire, il ne veut pas séduire : ils étaient fait pour se rencontrer avec leur esprit bougon. Borzage manie la légèreté avec autant de grâce que Lubitsch. Une merveille de tendresse.

Ceux de la zone (Man's castle, 1934)
L'ouverture du film est l'une des plus étonnantes. Loretta Young crève de faim mais donne pourtant des miettes de pain aux pigeons. Là, Spencer Tracy, vêtu en costume queue de pie et haut de forme, l'interrompt et l'invite au restaurant. Mais il est aussi pauvre qu'elle. Borzage poursuit son analyse de la vie des pauvres sous la crise. Il prouve, comme dans Bad Girl, que l'on peut dire de grandes choses sur le ton de la comédie.

Désir (Desire, 1936)
Marlene Dietrich est une voleur de bijoux mondaine, Gary Cooper est concessionnaire automobile. Les opposés s'attirent et la roublardise de la belle escroc va se cogner à la grande naïveté du petit vendeur, au sens propre comme au sens figuré. Le duo entre Dietrich et Cooper se promène entre l'Espagne et la France, entre les palaces dans une sensualité bien supérieure à celle de Morocco leur film commun tourné par Josef Von Sternberg. Une immense comédie.

Mortal Storm (1940)
Borzage est le précurseur du film anti-nazi, un genre auquel Lubitsch, Fritz Lang, Charles Chaplin et Jean Renoir ont largement illustré. C'est aussi le film qui va le plus loin dans la dénonciation du nazisme, comme Borzage dénonçait la guerre dans L'Heure suprême. Deux frères allemands vont s'affronter sur le terrain de l'idéologie et de l'amour. Pas de fantasme sur un attentat contre Hitler qui changerait le cours e la guerre, ici Borzage dénonçait déjà les camps de la mort dont tout le monde connaissait l'existence.

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