dimanche 23 août 2015

Amnesia (Barbet Schroeder, 2015)

45 ans séparent More, son premier film, d'Amnesia, son dernier film. Barbet Schroeder boucle ainsi la boucle de son cinéma et retourne à Ibiza dans la même maison où il avait tourné les amours de More. Entre ces deux films situés à Ibiza, le génial cinéaste aura posé sa caméra en Papouasie (La Vallée), en Ouganda (Général Idi Amin Dada), longtemps à Hollywood, un peu en France dans des appartements où on pratiquait le BDSM (Maîtresse), en Colombie (La Vierge des tueurs) et dans le cerveau complexe de Jacques Vergès (L'Avocat de la terreur). Dans Amnesia, l'action se déroule entre deux maisons aux murs blancs étincelants. Martha (Marthe Keller) habite là depuis des années, on ne sait combien, mais 45 ans séparent la fin de la seconde guerre mondiale de la chute du mur de Berlin. Là aussi, une boucle est bouclée pour Martha qui fût allemande mais refuse tout ce qui vient d'Allemagne.

Jo (Max Riemelt, repéré dans Free fall et dans Sense8 – celui qui montrait son sexe à la jeune Indienne) vient de s'installer dans la maison du dessus. C'est l'été juste après la chute du mur. Il croit qu'une nouvelle époque va commencer. Il a 25 ans et se rêve en DJ. La musique qu'il crée avec son ordinateur est composé de boucles sonores qu'il superpose. Je me rappelle la première chanson de l'album More des Pink Floyd où des chants d'oiseaux ouvraient le morceau. Jo fait la même chose, avec son micro, il enregistre des chants d'oiseau et les pose sur ses bandes sonores. Là aussi la boucle est bouclée. Ce jeune homme sans passé va chercher à faire que Martha se réconcilie avec son passé, et cela passe par la musique, quelques verres de vin et des promenades en barque.

Barbet Schroeder filme avec une infinie tendresse ce drôle de couple qui se forme sous nos yeux. Martha avec son sourire énigmatique qui refuse de parler allemand, Jo avec ses t-shirts trop larges et son air de grand naïf. Même quand Martha s'entête dans sa haine de l'Allemagne, créant un malaise ineffable lors de cette scène de repas avec Bruno Ganz ou donnant des moments comiques bienvenus, le cinéaste ne juge pas son personnage. Parfois, le thème de la mémoire, ou de l'absence de mémoire donc de l'amnésie, est un peu appuyé. La tension entre Ganz et Martha est un peu artificielle et, paradoxalement, ce que je trouve le plus justement rendu est cette esquisse de romance entre Martha et Jo. 45 ans séparent la vieille dame et le jeune DJ. Là encore, la boucle est bouclée.

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